mercredi 9 décembre 2015

Mathilde est revenue

Et allez !
Encore un texte tout chaud !
Écrit à l'instant.
L'idée était celle de la chanson de Brel "Mathilde est revenue" ; sur cette idée simple : un gars qui commence à maudire sa relation amoureuse et qui écrit pour y mettre fin et qui progressivement doit bien admettre qu'il n'a pas du tout envie qu'elle s'arrête.
Alors voilà, la technique est simple : on prend un vers récurrent, l'équivalent de "Mathilde est revenue" pour boucler chaque strophe. Ici, j'ai joué plus subtil ; n'étant pas aidé par un refrain, il fallait que le "Je ne veux plus te voir" arrive progressivement au "J'ai besoin de te voir". L'astuce est donc dans l'équilibre très dosé de la progression.
Ainsi, on passe du ton sentencieux (strophe 1) avec hémistiche choc et phrase sans appel, à un discours moins affirmé, juste un peu bravache (strophe 2) où on sent le cas coincé par la nécessité de donner des détails, de se justifier du genre "une de perdue, dix de retrouvées !" ; la strophe 3 est celle du basculement ; il fallait qu'on sente le type passer de la décision résolue à l'hésitation puis à l'abandon de ses belles résolutions. Ainsi la strophe médiane est-elle elle-même construite en symétrie, par rapport au texte entier.
Le "il faudrait se revoir" forme déjà très atténuée par rapport à "je ne veux plus de voir" (c'est le JE qui parle) et à "il ne faut plus nous voir" (une obligation impersonnelle a déjà remplacé le JE), est ponctué sur une forme interro-négative alors que les deux autres assertions sont des impératifs impérieux (si j'ose dire).
Ainsi, on passe progressivement dans le retournement d'opinion.
Strophe 4, le type est déjà dans l'idée que se revoir est possible et même envisageable, pour finir par ne plus vouloir que cela (strophe 5).
Bref, l'idée était bien celle de la possession : comment, tout en sachant qu'on ne doit pas le faire, on finit quand même par ne penser qu'à ça, parce qu'on est possédé par une relation dont on connaît les limites, mais aussi les délices.
Bon c'est encore un peu frais : je ne suis pas tout à fait certain d'avoir bien rendu tout ça et d'être dans la bonne progression, ni même que cette dernière est bien perceptible.
Il m'est arrivé souvent, comme à beaucoup je suppose, de ne pouvoir m'empêcher de faire des choses déraisonnables, de me jeter tête baissée dans un danger balisé. Non parce que j'étais persuadé de m'en sortir indemne, mais parce que même en sachant que j'allais sûrement casser du petit bois, les quelques minutes d'absolue félicité que j'allais voler à la noirceur du monde valaient mille fois les risques encourus.
Ça fait des années que j'ai au fond du cœur l'idée d'écrire ce genre de texte sur ce thème. Dans le cas présent, on notera que la femme fatale est assez peu présente malgré tout et en tout cas très très passive. On imagine très bien qu'elle ne demande rien, qu'elle demeure presque étrangère aux cas de conscience du bonhomme qui sûrement se pose bien trop de questions compliquées sur bien trop de choses assez simples (je ne vois pas de qui on parle, là...).


Bon, ne tournons pas autour du pot : on est tous un peu masochiste, les relations amoureuses sont souvent cruelles quand elles sont sincères et se payent parfois très cher.
Alors quoi ? Ne rien vivre pour éviter le danger ? Se protéger toujours au risque évident que si on fait en sorte qu'il ne nous arrive rien, il finira par ne rien nous arriver ? Ou foncer tête baissée dans la certitude des problèmes à venir ? Courir le risque ou laisser passer sa chance ?
Ce qui finalement, revient au même : c'est de toute façon déraisonnable ! De quoi s'en réjouir ou sombrer dans la cafard...
Si dans mon fan club quelqu'un est doué pour les titres, il y en a un à trouver...

dimanche 6 décembre 2015

La liberté guide nos pas

La victoire en chantant / Nous ouvre la barrière / La liberté guide nos pas...
J'aime beaucoup "le chant du départ", cette chanson révolutionnaire reprise comme hymne dans "la guerre des boutons" mais aussi "la gueule de l'autre" avec Serrault. Je crois me souvenir que VGE avait vaguement envisagé que ce chant puisse remplacer la Marseillaise ; pour le coup, je n'y aurait pas été hostile... C'est aussi la chanson que nous chantions en duo Jean-Paul et moi. Un jour, peut-être vous parlerai-je de Jean-Paul.
Mais au-delà de la chanson utilisée en titre, rien à voir entre le texte révolutionnaire (Chénier ? Oui, Chénier, j'ai vérifié et m'étonne encore d'avoir retenu le nom de l'auteur...) et le poème reproduit ici.
J'ai écrit ce texte ce soir (!) ; une prouesse dans le Cénotaphe qui ne se peuple ordinairement que de vieilleries. Je voulais écrire des choses nouvelles : moins orientées "femmes fatales" donc sur un sujet autre que la séduction, la beauté etc ; je voulais aussi me dégager des descriptions dont j'ai usé ces derniers temps ; enfin, je voulais un fil narratif dynamique.
Le sujet ne fut pas long à trouver : comme j'ai la furieuse actualité de tout plaquer en ce moment, il suffisait d'imaginer un départ, une sorte de libération. Un gars qui fait son baluchon et fait ses adieux à son petit monde. Très classique, et je devais du coup éviter les références du genre, entre "je m'en allais les poings dans mes poches crevées", "l'heure où blanchit la campagne" et même la chanson "je vole" de Sardou.
Tant et si bien que j'ai repris mon écriture ancienne au moins dans sa méthode ; bloc à carreaux et on griffonne ; je suis parti d'entrée sur des rimes dont je n'avais pas conscience qu'elles seraient si compliquées. Rimes embrassées ; que je continue à trouver bizarres, pas naturelles.
Le travail a avancé assez vite ; comme souvent, ça m'a pris entre 35 et 50 minutes. Les strophes ont été écrites dans un ordre différent de celui présenté : en l'occurrence 1, 3, 2 et 4.
Je suis assez content du rythme obtenu : cassures, faux hémistiches etc.
Je suis aussi content du vocabulaire plus accessible, presque vulgaire, en tout cas moins pédant que dans d'autres textes. Je voulais aussi créer une 5ème strophe, mais finalement, je ne la juge pas utile du tout.
Les rimes en OMPTER et en OURSE m'ont donné du fil à retordre, mais j'y suis arrivé sans trop de difficulté. Je suis même assez fier de "si tu crois aux regrets que le vent nous rembourse". Objectivement, ça ne veut pas dire grand chose, mais ça sonne bien et ça véhicule une sorte de sens caché (qui n'existe pas, donc) mais que l'oreille commande toujours au cerveau de rechercher dans les forme passive (encore une tromperie, puisque la phrase est à la forme active !).
A coup sûr, ce texte atypique dans ma création ne restera pas sans tache : en beaucoup trop d'endroits il ne respecte pas la métrique. Les vers 5 (strophe2) et 10 (strophe 3) font chacun 13 pieds si on compte correctement ; va encore pour le 10, mais le 5, c'est indépassable. Et le vers 6 utilise une astuce qui me déplaît en écrivant "encor" au lieu de "encore" ce que la métrique autorise mais qui me navre un peu... D'autant que cet usage est complètement périmé !
J'ai commis une grosse bévue dans les circonstances de création du texte. Comme un gros niais, comme j'avais juste eu le temps de le recopier au propre, j'ai voulu le saisir sur mon téléphone. Comme c'était soirée électorale, j'ai profité que tout le monde était devant la télé pour me mettre à l'écart. J'ai recopié mon machin et voilà... Et une bonne demi-heure plus tard, retournant vers l'endroit, je vois AS, un copain, avec le texte en mains !!! J'avais oublié de le reprendre ! Seconde bévue, au lieu de fermer ma grande gueule (le texte n'était pas signé) j'ai dit "mais c'est à moi, ça !" ce qui a jeté le bon AS dans une perplexité gênante...
Quand on est maladroit, on est maladroit.
Et j'ai peut-être perdu davantage encore.