mercredi 22 mars 2017

Chanson lente

On ne pourra pas dire que cette création arrive sans prévenir. Voilà en effet des années et des années que j'exprime y compris ici ma frustration à ne pas écrire de chanson. Donc, prenant mon bloc, mon stylo et mon courage à toutes mains disponibles, je me suis attelé à cette tâche impossible : écrire ma première chanson. Et comme le recours à cette écriture se faisait un peu forcé, il serait dès le début évident que j'en viendrais à écrire sur des choses assez peu personnelles, sur des thématiques pas forcément vécues.
Bon : j'ai toujours eu l'intuition que certaines choses se décrétaient ; il suffit parfois de se dire une fois et une fois pour toute "j'ai une confiance en moi énorme, il ne peut rien m'arriver de désagréable" pour ne plus souffrir jamais, quasiment, de défaut de confiance ; ce qui ne veut pas dire qu'on devient arrogant et qu'on ne craint plus rien ; simplement, on craint l'autre, la situation dans ce qu'elle peut avoir d'anxiogène, mais on ne se craint plus soi. J'ai décrété, moi, cela vers 15 ou 16 ans, et depuis j'ai tous les culots. Je vous vois venir, et vous vous dites, parce que vous connaissez les textes de cette page comme ma poche, que tout cela n'est pas très compatible avec celui qui disait qu'en amour comme en beuverie "il faut remplir mon verre" et me forcer la main.
Rien d'incompatible, au contraire : ne pas être timide ne veut pas dire ne rien craindre du tout ! Et j'ai de certains enjeux une conscience si fine qu'ils peuvent me tétaniser complètement.
Bref, tout ça pour dire que cette fois, je décrétai une thématique artificielle et quelques autres éléments de forme sans autre justification que le décret arbitraire : 7 strophes ; refrain sur 2 rimes, couplet sur 3 rimes ; Nouvelle-Orléans. Oui, je cherchais un élément de langage sur lequel j'aurais pu bâtir un refrain ; quelque chose qui sonne exotique mais pas trop (on évite "Tegucigalpa" par exemple) qui puisse véhiculer une image moyenne, accessible. J'étais dans l'idée que pour faire une chanson, il faut un vocabulaire et des tournures moyennes.
Bon, va pour la Nouvelle-Orléans ; je trouvais amusante la particularité de cette ville dont le déterminant est plus ou moins partie du nom comme Le Mans  ou  Le Touquet.
Et ensuite, je me laissait un peu de marge : faisons un essai, et faisons moyen.
J'ai d'abord écrit les refrains ; rimes en "en" pour coller à "Orléans" ; puis mis dans l'ordre, ce qui était plaisant parce qu'à ce moment là, on construit un peu le texte, on commence à l'organiser, à lui donner une progression, une cohérence. Je voulais un texte qu soit un appel à partir, une invitation à tout recommencer ailleurs ; thème assez bateau, mais qui permet d'interpeller quelqu'une et d'évoquer en les mettant en parallèle, une réalité dépeinte comme crasseuse et un ailleurs forcément mirifique.
Et puis bon, je ne désespère pas qu'elle me lise et peut-être m'écoute.
Créer les strophes fut pénible et laborieux ; me défaire de la métrique alexandrine n'est vraiment pas aisé pour moi, et d'ailleurs, hormis le refrain "A la Nouvelle-Orléans", tous le reste est bâti sur des hexasyllabes ; faux, bien entendu puisque tous les "e" muets sont bouffés ; il en va ainsi dans la chanson moderne ; et c'est aussi bien. Il n'empêche que cette musicalité est très différente de celle qui m'est propre,  et que je n'ai pas aimé travailler sur ce texte ; la création fut pénible ; pas trop longue (1 à 2 heures en tout) mais réellement frustrante ; je me suis plusieurs fois puni de formules trop compliquées ; il fallait visé simple, éviter les mots savants et les phrases ; juste quelques mots et beaucoup, beaucoup, d'élision.
J'ai beaucoup retouché : étape gratifiante quand on part d'une chose aussi moyenne ; finalement, je suis arrivé à quelque chose qui me plaît, même si c'est bien moins précis et parlant, selon moi, qu'un poème.
Il ne reste plus qu'à faire une musique. Si parmi les nombreux fan de ce blog il s'en trouve qui savent faire des musiques, qu'il ne se privent pas ! Moi, vraiment, je ne sais pas faire.